L’idée à la con : le gazoduc à hydrogène

Idée à la con chat Marianne

Troisième chronique pour MarianneTV consacrée au gazoduc à hydrogène, énième connerie macrono-européenne et donc, pangermaniste (j’exagère).

En voici le texte (et la vidéo), mais comme on dit dans les cabinets ministériels, « seul le prononcé fait foi » :

Une idée née dans des cerveaux espagnols et français qui a bien évidemment été louée par notre Giscard réincarné – avec pas mal d’erreurs, Emmanuel Macron.

Lui, parle de H2Med, prononcez « ayetchtoumid. »

Donc, voici un gros tuyau à 2,5 milliards posé sur le fond de la Méditerranée entre Barcelone et Marseille, où passeront des flots ininterrompus de cette nouvelle manne divine, l’hydrogène.

Vert, évidemment, l’hydrogène, car produit à partir de l’eau électrolysée au moyen d’électrons générés par la rotation des éoliennes ou la conversion de la lumière par des panneaux photovoltaïques.

Avec ce gros machin, 10 % des besoins de l’Europe en hydrogène seraient couverts en 2030.

Vous en doutez ? n’en doutez plus car Charlemagne lui-même a approuvé le projet : Olaf Scholtz a décidé que le tuyau irait jusque chez lui.

Le soleil et le vent ibériques pour faire tourner les usines germaniques, c’est écologique.

Or, quand l’Allemagne décide, tout le monde approuve, donc, une fois encore, après le marché de l’énergie, l’euro, la désindustrialisation et la dénucléarisation, l’Allemagne va nous emmener dans le mur.

Car l’hydrogène est un non-sens.

Cela fait trente ans que j’entends dire que c’est le Saint-Graal.

Cela fait deux siècles qu’on sait que l’hydrogène « tout seul » n’existe pas dans la nature. Il est partout, mais toujours lié à une molécule. Alors, il faut le délier, bref, le fabriquer.

Comment ? Aujourd’hui, en cramant du méthane. Demain, en électrolysant de l’eau ou bien, rêvons, en faisant bouillir de l’eau à 3 000 °C dans des réacteurs nucléaires de quatrième génération, qui n’existeront pas vue que la France s’est retirée du programme international de recherches en la matière.

Tout de même, nos centrales actuelles peuvent en produire, mais l’Allemagne refuse que le courant qu’elles produisent soit qualifié de « vert ». Il ne s’agirait pas tout de même que l’hydrogène redonne un avantage compétitif à la France !

Restons-en donc à l’électrolyse.

Voici la recette :

Dans un1 l d’eau vous faites passer 5 kWh d’électricité.

Vous obtenez 1 000 l d’hydrogène sous forme de gaz.

Ces 1 000 l d’hydrogène gazeux ont une énergie potentielle de… 3 kWh. Vous avez donc déjà perdu 40% de l’énergie de départ.

Et tout cela pourquoi ? Pour 3 kWh qui représentent le tiers de l’énergie potentielle… d’un petit litre d’essence. 

Autrement dit, avec 1l d’essence, c’est comme si vous aviez 3m3 d’hydrogène dans le réservoir ! 

Étape 2.

Nous avons donc fabriqué de l’hydrogène, il faut maintenant le transporter. Or, la molécule est très peu dense. Donc, il faut la comprimer. Plus que dans une pompe à vélo : 700 bars, soit 700 fois la pression atmosphérique.

Mais il y a des pertes. La compression consomme… 15 % de l’énergie contenue dans le gaz.

Si vous avez bien suivi, on était à 5 au départ, on a obtenu 3, et en définitive, dans la bonbonne, il reste 2,55 kWh.

49 % de l’électricité d’origine ont déjà été perdus.

Tout cela pour obtenir 1 l d’hydrogène comprimé qui contient… un septième de l’énergie délivrée par 1 l d’essence !

Le gazoduc en vaut-il la chandelle ?

Si c’est pour alimenter la flamme des usines sidérurgiques, c’est tout bénéfice pour le climat.

Mais l’Europe veut alimenter ses véhicules avec. Rendement ? 50 % avec de l’hydrogène gazeux alimentant une pile à combustible, 25 % avec du gaz injecté directement dans le moteur.

Rendement final, par rapport à l’électricité consommée par l’électrolyse : entre 12 et 25 %. Autrement dit, entre 75 et 88% de pertes.

Et je ne vous parle pas des difficultés de distribution et de stockage jusqu’à la station-service.

Ni des surfaces démesurées d’éoliennes et de panneaux solaires qu’il faudrait.

Ni encore de l’impact climatique des fuites d’hydrogène : puisqu’il perturbe la destruction naturelle du méthane, l’hydrogène est, selon le CNRS près de 13 fois plus favorable à l’effet de serre que le dioxyde de carbone.

L’hydrogènoduc, encore une belle idée à la con pour le seul bénéfice de l’Allemagne. La preuve, elle refuse que le nucléaire soit considéré par l’Europe comme une source décarbonée d’électricité pour l’électrolyse.

Histoire d’achever le peu de compétitivité et d’industrie de pointe qui reste à la France, et d’imposer au continent SON hydrogène vert, celui que des pays plein de soleil, de vent et de foncier produiront pour elle.