Pour être certains que le texte originel du projet de loi Duplomb sera bien celui qui aura le plus de chances d’être voté, les députés LR et RN ont décidé… de ne plus le soutenir à l’Assemblée. Pas de vote en séance !
Ainsi, le texte revenu à sa version initiale échoit à la commission mixte paritaire composée de 7 sénateurs, majoritairement en sa faveur, et de 7 députés, plus partagés. Bref, c’est une sorte de 49.3 car le texte originel a de fortes chances de passer.
Alors, sera sans doute réintroduit un néonicotinoïde, un contrôle de l’Anses par trois ministères qui s’appuieraient sur un « conseil d’orientation pour la protection des cultures » au sein duquel siégeront les producteurs de pesticides, une « raison impérative d’intérêt public majeur » accordée de fait à presque tous les projets de bassines (sans trop de discussions), une interdiction pour les agents de l’OFB de transmettre directement leurs verbalisations au Procureur etc.
Cinq questions :
– est-ce que tous ces reculs faciliteront la vie des agriculteurs ? Pas de beaucoup, car cela ne fera pas maigrir le monstre bureaucratique auquel ils sont soumis ;
– est-ce que cela va améliorer leurs revenus ? Non, car ils sont formés par la Grande distribution, les coopératives et la différence des coûts de production entre la France et d’autres pays ;
– la productivité va-t-elle augmenter ? Non, car elle stagne pour toutes les grandes cultures depuis plus de vingt ans, elle baisse même pour les cultures qui ont besoin de la pollinisation ;
– que vont-ils y gagner, les agriculteurs ? Rien, si ce n’est un peu de temps avant la prochaine crise agricole, car l’air du temps continue de souffler dans le même sens, chaque année plus fort ;
– ce texte est-il réclamé par tous les agriculteurs ? je n’en ai pas l’impression.
Un projet de loi trumpien par essence, car il nie des évidences scientifiques, il réécrit la réalité, il bafoue le processus démocratique, il est issu du Comité central de ce parti stalinien qu’est la FNSEA, qui ne représente que ses filières les plus puissantes, menace par la rue et contrôle la ministre officielle de l’agriculture qui n’en est plus que la porte-parole.
Mais après tout, pourquoi la FNSEA se gênerait-elle ? Le monde agricole est un corporatisme comme un autre dans un pays où chacun défend son bout de gras. Ne rien changer, dans tous les domaines, malgré la dette, le climat, la santé, l’Ukraine, la désindustrialisation, l’insécurité, la France ne sait que réclamer, et souvent obtenir, un chèque ou un avantage.
Une France dont certains se prennent à rêver d’un Michel-Edouard Leclerc à sa tête, un « cost killer » (d’agriculteurs). Ça aussi c’est trumpien.
Le pire c’est que ça ne m’énerve même plus, pas plus que l’Ukraine ou Gaza. Je baisse les bras mes amis, car je commence à ne plus y croire du tout.
https://lnkd.in/enCVHadt